La foule des Rameaux
Nous
entrerons dans la Semaine sainte par le porche que constitue la fête des
Rameaux. Ne sommes-nous pas, chrétiens, plus souvent que nous ne le pensons,
cette foule des Rameaux ? Celle qui acclame le Fils de David en jetant manteaux
et branches d’arbres sur le passage de l’étrange cortège : Le Maître monté
sur une ânesse, et ses disciples, dont la peur et le trouble intérieurs ne
sont guère atténués par le fragile enthousiasme d’un instant.
Et
ils ont raison les disciples… car la foule est changeante et ils n’en sont
pas très éloignés. L’histoire est riche en exemples de retournements de
la foule. Elle met rapidement à mort ceux qu’elle a encensés. Elle vous redresse
en un tour de main ceux qu’elle avait ignorés. Le seul qui ne se fait guère
d’illusion c’est bien – à cet instant de l’Évangile – celui qui la connaît
le mieux et qui lui a si souvent parlé.
Il
ne l’a pourtant jamais flattée, il ne lui a pas fait de fausses promesses.
Il l’a même parfois rudoyée mais toujours au nom de cette vérité et de
cette justice dont il était, au nom de Dieu, le messager et même, beaucoup
plus, l’incarnation et la présence. Il a guéri ses malades, nourri ses
affamés, rendu leur visage et leur nom à ses anonymes.
D’ailleurs,
pas d’inquiétude apparente… Pour l’heure ils sont là. C’est à celui qui
crie le plus, qui chante plus fort que les autres, qui trouve le meilleur qualificatif
: « Envoyé du Seigneur, Prophète, Fils de David » et j’en passe sûrement…
À l’applaudimètre de la foule, Jésus est vainqueur. Il ne sera pas arrêté.
Pensez donc ! Elle réagira, la foule, elle fera barrage… Vous la sonderiez
sur le champ qu’elle serait ébahie, la foule, si vous envisagiez la moindre
menace pour celui qui lui a rendu espoir et courage.
Mais
elle changera rapidement d’avis et réclamera la mort, quitte à verser
quelques larmes, en se frayant une place sur les bords du chemin qui conduit
au Golgotha.
Nous
sommes, encore aujourd’hui, cette foule qui acclame et qui condamne. Tous,
à différents niveaux, sous différents visages. Sans exception… Et si,
dans cette foule, avaient lieu quelques actes de conversion ? Ils suffiraient
sûrement pour proclamer, à la face du monde, que les paroles et les actes
de celui que l’on a crucifié, en dépit des violences ou des ralliements
à ceux qui veulent la mort du juste, sont le signe que l’Amour peut traverser
le pire, pour être, parce qu’il s’agit de Dieu, source et don de la vie éternelle…
Mgr André Dupleix Ancien Secrétaire
général adjoint de la Conférence des Evêques de France
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire